Il suffit de trois semaines pour oublier le contenu d'un cours. Ou presque. Durant ce laps de temps, sans revoir ses notes, l'étudiant se souviendra tout au plus de 20% de la matière enseignée. Car la mémoire fonctionne comme une courbe. Au fil des jours, une partie des informations engrangées est oubliée. Mais pas de panique, il existe des stratégies simples pour éviter de se vider les méninges.
«Pour éviter le déclin de la courbe de mémoire, commencez par un tout petit rafraîchissement après le cours, explique le Dr Delphine Rinaldi, responsable du programme «Réussir ses études» à l'Université de Genève. Ensuite, je conseille de retravailler les notes en profondeur le soir même.» Ces actions permettent de «remonter» cette fameuse courbe de la mémoire... qui redescend à nouveau au fil des jours. Il est donc important de revoir la matière avant la semaine suivante, afin de garder en tête le fil conducteur du cours. Suivie régulièrement, la méthode permet d'éviter les phases de bourrage de crâne, absolument inutiles. Le secret d'une mémorisation intelligente - et de la réussite, commence donc par la stratégie. Et pas besoin d'avoir le QI d'Einstein pour prendre un peu de temps et élaborer un plan d'études. L'investissement est minime, le gain de temps pour la suite est énorme.
Première étape, le cours. Concentré, l'étudiant qui s'investit dans la leçon commence déjà à travailler la matière. Alors exit jeux et chat sur l'ordinateur portable. Et les discussions existentielles attendront la pause-café. Bien suivre le cours, c'est par exemple poser une question au prof, ou s'en poser à soi-même si l'on n'ose pas. D'où l'importance d'avoir révisé les notes du cours précédent. «Lorsque que l'on ne sait pas trop de quoi le prof parle, on risque d'être un peu perdu», souligne Delphine Rinaldi. Mais si, pour une raison ou une autre, un étudiant doit manquer un enseignement? «C ela doit rester une exception, conseille la spécialiste. Si cela arrive, l'idéal c'est de se procurer le plus rapidement possible le cours d'un ami. Et de faire le travail sur les notes comme si l'on avait suivi le cours.» L'important étant de rester à jour d'une semaine à l'autre.
Etape suivante, faire le bilan de sa motivation. Presque une évidence: les matières qui nous passionnent posent peu de difficultés. «Quand un cours n'intéresse pas, on va à penser à autre chose et moins s'investir, éclaircit Delphine Rinaldi. Cette attitude là va vraiment avoir un impact sur la mémorisation.» Tout étudiant n'est pourtant pas voué à l'échec devant un cours obligatoire et ennuyeux à mourir. «Si c'est le prof qui démotive, il faut essayer de faire abstraction de sa personnalité pour se concentrer sur le contenu, suggère Delphine Rinaldi. Si c'est le contenu qui pose problème, essayer de trouver de l'intérêt ailleurs: dans la personnalité du prof ou développer ses connaissances pour mieux apprécier le sujet.»
Sans motivation, on entre dans un cercle vicieux. Les statistiques sont souvent présentées comme la bête noire des étudiants. Et lorsque l'on n'aime pas, on va moins faire. Du coup on maîtrise moins et on se sent perdu. Une solution? Commencer par la partie du cours la plus facile à comprendre pour se constituer un seuil de connaissances. Une base qui va permettre de beaucoup mieux comprendre un cours compliqué. Sinon, essayer de relativiser, de voir l'objectif final en se disant: «J'en ai vraiment besoin pour ce que je veux faire».
Après avoir suivi le cours attentivement et trouvé un intérêt, même minime, à la matière, une grosse partie du travail est entamée. De là, pour gagner un maximum de temps, il est nécessaire d'identifier les tâches à faire pour réussir l'examen. Simple, non? Pourtant, très peu d'étudiants réussissent à déterminer ce qu'attend vraiment le prof. Et ingurgitent beaucoup de matière inutile... encore des heures perdues. Une fois les tâches clairement identifiées, prévoir 45 minutes par travail. «T rois quarts d'heure assurent une attention maximale», précise Delphine Rinaldi. Par exemple, on peut découper une lecture de trois heures en quatre tranches de 45 minutes. Ensuite, bien répartir dans la semaine les moments de travail. Pour la spécialiste, il faut prévoir les devoirs compliqués lorsque l'on est au top de sa forme. La recette pour garder la motivation? Alterner un travail ennuyeux avec une autre tâche plus sympa. «En travaillant de cette manière, on se rend compte que l'on a aussi du temps pour soi, dit Delphine Rinaldi. Le pire, c'est d'avoir toujours l'impression de travailler, d'être mal organisé et de paniquer ensuite.» En bref, il faut savoir délimiter le temps de travail, sans être toutefois trop strict avec soi-même.
Au moment de travailler le cours, il est nécessaire d'être investi à 100%. Relire ses notes se fait de façon active, en se posant des questions et en mettant en évidence les points essentiels. Une séance de gymnastique de la matière grise s'effectue assis à un bureau plutôt que couché sous le duvet. Utiliser l'imagerie mentale aide à donner une forme concrète à une idée abstraite. Par exemple, s'il faut connaître des dates, imaginer que chaque siècle correspond
à l'étage d'une maison, et chaque année à un numéro de porte. Si l'image s'associe d'une émotion ou d'une référence personnelle, l'effet de mémorisation sera d'autant plus surprenant.
3 questions à Delphine Rinaldi, Docteur en Sciences de l'éducation
L'âge influence-t-il sur la capacité d'apprentissage?
C'est une question qui revient souvent, surtout chez les étudiants qui reprennent les études. Mais il n'y a pas de raisons qu'ils aient une moins bonne mémoire que leurs collègues plus jeunes. A moins d'un accident ou d'une maladie, il faut atteindre un âge très avancé pour voir ses compétences diminuer. La capacité de la mémoire est plus ou moins équivalente chez tout le monde. En revanche, son utilisation diffère. Par exemple, si l'on a passé beaucoup de temps dans la vie active, on a simplement perdu l'habitude d'utiliser sa mémoire. Il faut reprendre confiance et adopter une stratégie. Et ça vient assez vite.
Mais tout le monde ne possède pas les mêmes capacités cognitives...
Il y a quand même des différences entre les étudiants. Certains m'épatent par leurs capacités. Mais, plutôt que d'avoir des aptitudes exceptionnelles, ils utilisent en réalité des stratégies, presque à leur insu. L'intérêt et la motivation jouent aussi un grand rôle. Quand on est enthousiasmé par une matière, on aura tendance à lui prêter plus d'attention lorsqu'elle est abordée dans les médias ou durant les cours.
Quelles erreurs répètent le plu s souvent les étudiants?
Se contenter de recopier le cours, ça ne sert pas à grand chose. Passer des heures à étudier sans stratégie et sans concentration, c'est également inutile. Si on lit un livre en se couchant sur son lit sans crayon ni prise de notes, c'est une perte de temps. Mieux vaut être actif une demi-heure, se mettre à une table, bien assis, avec une lumière correcte, prendre des notes... que travailler une heure en pensant à son week-end.
Et si le simple fait de dormir aidait à apprendre ses leçons? Un rêve pour les étudiants... Les chercheurs en psychologie de l'Université de Californie ont pourtant obtenu des résultats étonnants. Les scientifiques ont étudié deux groupes de vingt personnes. Les premiers ne se reposaient pas, les autres dormaient pendant 90 minutes après le repas. En fin de journée, les deux groupes devaient effectuer des tests cognitifs identiques. Les personnes qui ne s'étaient pas reposées voyaient leurs performances diminuer. Celles qui avaient fait un petit somme avaient un meilleur taux de réussite... qu'avant la sieste. Selon les chercheurs, l'expérience prouve que le sommeil permet de vider la mémoire à court terme et améliore la capacité du cerveau d'intégrer de nouvelles informations. Une autre étude, menée à l'Université de New York, montre que le cerveau continue de travailler lorsque la personne fait une pause, même sans dormir.
D'autres recherches se sont intéressées aux effets de l'alimentation sur la mémoire. Le poisson, les noix et les épinards contenant des oméga-3 et des acides gras aideraient à garder l'esprit vif. Faut-il pour autant passer à un régime «spécial mémoire»? «Je pense que le lien entre poisson et mémoire n'est pas direct, commente Delphine Rinaldi. Mais il est une excellente source de nutriment et il est toujours conseillé d'avoir une bonne alimentation.» C'est à dire troquer son paquet de chips contre une belle salade de fruits. Et surtout, un apport de sucres lents dans la journée est essentiel pour éviter les baisses de régime.