Impératif financier ou tremplin professionnel? Source de stress ou garantie d'épanouissement? De toute évidence, l'adéquation entre études et petits jobs s'inscrit parmi les problématiques récurrentes de la vie estudiantine. L'Office fédéral de la statistique (OFS) y a d'ailleurs consacré un chapitre édifiant dans sa dernière enquête sur les conditions économiques et sociales des étudiants en Suisse. Il en ressort un chiffre qui traduit de façon particulièrement éloquente l'implication des petits emplois dans le quotidien des étudiants. Bien que les études soient conçues pour être suivies à plein temps, plus de 80% de la population académique s'évertue à concilier affairement studieux et corvées lucratives ! Mais pourquoi faire preuve d'autant d'assiduité, au risque de sacrifier les délices libertaires inhérents à la condition d'étudiant ? Les étudiants travaillant le plus à côté de leurs études sont dans les branches les moins réglementées.
Décryptage de la participation massive du corps estudiantin au marché du travail.
Nécessité financière?
Avant de jeter la pierre aux âmes pieuses qui renoncent à jouir pleinement des libertés académiques, donnons la parole à la défense.
Selon l'étude réalisée par l'OFS, 65% des étudiants pratiquent une activité rémunérée pour être plus à l'aise financièrement et 56% estiment que ces revenus leur sont indispensables pour vivre. Les principales motivations sont donc d'ordre économique. De fait, le loyer, la nourriture et les dépenses liées aux études (taxes, transports, matériel) peuvent considérablement grever le budget. La situation est d'autant plus laborieuse pour ceux qui ne bénéficient d'aucun soutien parental. Voilà un plaidoyer qui justifie la renonciation à l'oisiveté et à la paresse.
Cela dit, ces chiffres reflètent surtout la dégradation de la situation sociale des étudiants au cours des dernières années. Moins de 20% de la communauté estudiantine peut aujourd'hui s'appuyer sur une bourse ou un prêt. A cela s'ajoute la participation croissante des activités lucratives au budget total, soit 40% en moyenne. Dans ces conditions, nombreux sont ceux qui ne peuvent poursuivre leurs études sans exercer un petit boulot en marge. De cette nécessité découle une pression supplémentaire, qui peut compromettre le bon déroulement de la formation.
Insertion socioprofessionnelle?
Outre le facteur financier, l'étude de l'OFS met en évidence une autre raison de faire fi des tentations outrancières du mode de vie estudiantin.
Ainsi, nombreux sont ceux qui invoquent des motivations liées à une future insertion professionnelle. En ce sens, privilégier un petit emploi en lien avec ton domaine d'études peut s'avérer fort judicieux.
Pour 51% des étudiants, c'est l'occasion d'acquérir des compétences professionnelles en cours d'études et d'étoffer progressivement leur curriculum vitae. 39% soulignent vouloir augmenter leurs chances sur le marché du travail. Rien de tel pour faire bonne figure devant un employeur que d'avoir déjà étrenné quelques responsabilités durant sa formation. 32% évoquent la possibilité de nouer des relations en vue de favoriser leur insertion professionnelle. Enfin, 26% souhaitent se sentir mieux intégrés socialement.
Il n'est donc pas anodin d'anticiper la transition vers la vie professionnelle. Par trop se repaître des largesses académiques, nombre de diplômés, lâchés sans repères dans la vaste nébuleuse professionnelle, se retrouvent désemparés au moment de décrocher un premier emploi. « Gagner des sous maintenant tout en pensant à son avenir professionnel … », telle pourrait être la devise de l'étudiant consciencieux et averti.
Adéquation avec les études?
Pourtant, si l'on s'en réfère à l'étude de l'OFS, il s'avère qu'une grande partie des activités rémunérées exercées par les étudiants n'ont pas de rapport direct avec les études suivies. Plus de la moitié des universitaires (55,7%) et un peu moins de la moitié des étudiants HES (42%) indiquent que leur petit emploi n'a aucun lien avec leur formation. Est-ce dire que le sens de la prévoyance déserte les couloirs des hautes écoles ?
Le problème se situe, de toute évidence, à un autre niveau. Trop souvent, il n'est pas possible d'opter pour un travail qui apporte une expérience pratique dans son domaine. Au contraire, il faut accepter ce qui se présente afin d'acquérir, en priorité, les revenus nécessaires pour couvrir le budget. Nécessité fait loi, dit un proverbe.
Néanmoins, il semblerait que l'adéquation entre les activités rémunérées et les études évolue avec l'âge. Plus tu es avancé dans ton cursus, plus tu disposes de connaissances spécialisées dans ton domaine d'études. Ainsi, la probabilité de pouvoir te servir de ce savoir dans un job rémunéré se trouve accrue. Nous pouvons par ailleurs poser l'hypothèse que les étudiants plus âgés cherchent plus sciemment un petit emploi en rapport avec leurs études, et ce afin de mieux préparer leur insertion professionnelle. La sagesse s'acquiert avec l'âge, dit un autre proverbe.
Quel investissement en temps?
Le facteur de l'âge détermine aussi le nombre d'heures par semaine consacrées aux petits jobs. Selon l'étude de l'OFS, les étudiants de moins de 21 ans présents sur le marché du travail consacrent en moyenne entre une et huit heures par semaine à leur emploi, soit moins d'un jour par semaine. Bonjour paresse ? Non, il paraît plus probable que l'implication dans le monde professionnel évolue en même temps que les exigences du cursus diminuent. Ainsi, entre 21 et 25 ans, la majorité des étudiants travaillent entre un et deux jours par semaine. Audelà de 25 ans, la plupart y consacrent deux jours ou plus par semaine. Les catégories d'âge «26–30 ans» et «plus de 31 ans» englobent quant à elles la majorité des étudiants en cours d'emploi, dont plus de 80% exercent une activité rémunérée plus de trois jours par semaine. En conclusion, la relation à l'activité rémunérée ne se résume donc pas au caractère désinvolte ou zélé de « l'Homo etudiantus ». La dégradation de la situation sociale et économique des étudiants explique en grande partie leur implication massive sur le marché du travail. Cette participation évolue ensuite en fonction de l'âge et des modalités propres à chaque domaine d'études.
Si exercer un petit job peut te stimuler dans tes études, te servir de tremplin professionnel ou t'épargner quelques contrariétés liées à ton portemonnaie, la double charge « emploi et études » est aussi susceptible d'empiéter sur le bon déroulement de ta formation. Concilier nécessité et réussite académique, voilà le dilemme cornélien auquel la plupart des étudiants sont aujourd'hui confrontés. résultats en vrac
Dans les domaines plus fortement réglementés ou comptant un nombre élevé d'heures de cours, les étudiants ont des parents dont le niveau de formation est souvent élevé.
Un étudiant dont les parents n'auraient pas les moyens de payer ses études choisira une branche où il aura le temps de travailler à côté.
45% des étudiants travaillent comme auxiliaires, 23% comme employés spécialisés, 13% comme enseignants et 10% comme stagiaires.
Les étudiants investissent environ 38 heures par semaine pour leurs études, 7 dans l'exercice d'activités rémunérées, 6 dans leur ménage et 2 dans des activités bénévoles.
90% des étudiants bénéficient d'un soutien de leur parenté. Ils sont presque autant à s'appuyer sur des ressources provenant d'une activité rémunérée (86%). A l'inverse, moins de 20% des étudiants peuvent compter sur une bourse ou un prêt.
Près de la moitié des personnes qui ont un taux d'occupation annuel moyen de plus de 30% disent que cette juxtaposition leur pose problème ou qu'ils préfèreraient travailler moins pour accorder plus de temps à leurs études, mais qu'ils ne peuvent pas se le permettre pour des raisons financières.