Les vols paraboliques de l'ESA font partie des «opérations de séduction» auprès des futurs professionnels de l'espace, afin de susciter des vocations et, par la même occasion, de se faire un peu de promotion. Le principe est simple: l'Agence spatiale européenne permet chaque année à une trentaine de groupes d'étudiants européens de réaliser une expérience scientifique en leur faisant jouer au yo-yo: Par une succession de montées et de descentes brutales, l'avion crée à chaque «parabole» une situation d'apesanteur d'environ 30 secondes. Tout cela donne un petit aperçu de ce que peut ressentir un astronaute dans l'espace, et d'inoubliables sensations.
Ouvert à tous
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, cette opportunité n'est pas réservée aux écoles d'ingénieurs, mais à tous les étudiants, qu'ils soient en Lettres ou en Médecine. La seule véritable condition pour pouvoir participer est de réaliser une expérience nécessitant la situation d'apesanteur. Ainsi, il n'est pas rare que des étudiants en Psychologie montent à bord du «Zéro G» (le nom de l'Airbus utilisé pour les vols), afin de réaliser des observations sur les réactions humaines en situation de microgravité. Parmi les étudiants ayant pu faire le baptême de l'apesanteur en 2005, 4 candidats de l'EPFL: Philippe Kobel, Nicolas Dorsaz, Danail Obreschkow et Aurèle de Bosset. «Au début, on voulait simplement voler, raconte Philippe. Mais nous étions à des kilomètres de réaliser la masse de travail qui nous attendait vraiment!». En effet, après avoir déposé leur candidature en décembre 2004, l'équipe, baptisée flash&splash, passe de nombreux mois dans les sous-sols du bâtiment LMH de l'EPFL à l'avenue de Cour à Lausanne. Pour se rendre compte du nombre d'heures passées sur leur expérience, il existe un calcul très simple: «Pour une seconde d'apesanteur, il fallait compter une heure de travail, rapporte Danail. Et nous avons flotté 2'400 secondes!»
Flash and splash!
A priori, l'objectif que le groupe s'est fixé est simple: il s'agit de produire une goutte d'eau, et de créer une décharge électrique dans cette bulle. Cette décharge (flash) crée un phénomène de cavitation (en gros une bulle dans une bulle) qui fait littéralement imploser la goutte d'eau (splash)... Voilà pour la théorie (version très courte). Mais pour créer cette goutte, nos 4 collègues auront besoin d'une machine de plus de 100 kilos ! Entre le matériel d'enregistrement, les caméras, les instruments de mesure, l'entier de la machine est impressionnant de complexité. Et les jeunes ingénieurs voient leurs chromosomes de scientifiques prendre le dessus... «Petit à petit, le vol n'était plus un objectif, confirme Philippe, mais l'occasion de pouvoir enfin tester l'expérience !». Et tout ce travail de mise au point se fait sous le contrôle des professeurs, et sous le management de Claude Nicollier, qui fera se réunir les 4 équipes suisses afin qu'elles puissent unir leurs connaissances. L'équipe doit assurer elle-même le financement de l'expérience (qui représente tout de même plusieurs milliers de francs de matériel) avec notamment l'aide du Fonds national suisse de la recherche scientifique et bien sûr tout l'aspect technique. A noter que les étudiants de l'EPFL peuvent tout-à-fait faire valider l'expérience comme travail de diplôme...
Mais nos 4 étudiants ne sont pas au bout de leurs émotions: quelques temps après un vol couronné de succès, l'ESA les recontacte afin de leur annoncer qu'ils ont été sélectionnés pour accomplir un second vol l'été prochain. Mais cette fois, dans la catégorie des professionnels ! «A mon avis, ils ont dû réaliser que nous n'avions pas l'intention de nous arrêter après le vol, estime Danail.» L'aventure continue donc pour nos 4 amateurs de sensations fortes, qui vont avoir le plaisir de faire à nouveau un tour de grand 8. Peut-être de futurs astronautes... Alors bonne chance à flash&splash!