On croyait les années 80 mortes et enterrées, juste bonnes à être des prétextes pour des compils beaufs. Mais depuis quelques années, certaines stars pop et new wave de l'époque font à nouveau parler d'elles. Cure, New Order, Echo and the Bunnymen et j'en passe, sont ainsi régulièrement cités comme références par la nouvelle vague rock. La filiation entre des groupes comme Interpol, Franz Ferdinand ou Bloc Party et leurs pairs est évidente. Mais loin d'être une redite, ce revival reprend certaines formules des années 80: basse mélodique, chant haché hérité du punk, synthés vintage, tout en insufflant une énergie et une fraîcheur très rock qu'on avait un peu perdues.
Les années 80 ont longtemps été considérées comme une décennie musicalement ingrate. Premièrement, car les poids-lourds des années 70 (Led Zeppelin, Pink Floyd, Supertramp...) ont un peu éclipsé, à nos yeux, les tendances musicales de l'époque (new wave, gothic, pop synthétique...) qui paraissaient, en comparaison, bien peu abouties et naïves. Deuxièmement, car une grande partie de la production musicale de l'époque n'est objectivement pas très intéressante, ni originale. Ce manque d'inspiration s'explique notamment par l'arrivée d'instruments numériques qui envahissent le marché à cette époque: synthés, boîtes à rythmes, séquenceurs .... Le premier synthé numérique vendu à un prix abordable (le célèbre Yamaha DX7 sorti en 1983) se retrouvera par exemple sur un nombre incalculable de disques, jusqu'à l'écoeurement. Dès lors, il semble logique que pendant un temps, les années 80 aient été synonymes de mauvaise qualité; on en retenait tout au plus quelques tubes sur lesquels il faisait bon se déhancher en fin de soirée genre «Final countdown» de Europe ou «L'aventurier» d'Indochine.
Mais cela a changé. Aujourd'hui, un groupe comme Interpol, qu'on compare à Joy Division (pour le chant et le look), tourne avec The Cure aux Etats-Unis. Bloc Party - dont l'excellent «Silent Alarm» a été élu disque de l'année par le New Musical Express - est autant influencé par My Bloody Valentine que par Echo and the Bunnymen pour la musique, alors que le chant incisif semble être celui d'un Robert Smith (chanteur et leader de The Cure) avec quelques années (et kilos) en moins.
Franz Ferdinand, qu'on a pu entendre cet été au Paléo, ne renie pas non plus l'héritage 80's: l'esprit des Talking Heads et d'Echo and the Bunnymen (dont l'album Corcupine de 1983 semble avoir été le disque de chevet d'une bonne partie du groupe) plane sur leur dernier jet «You could have it so much better». New Order, grâce au génial «Power, Corruption and Lies» sorti en 1983, a également eu une influence considérable sur le rock actuel: on lui doit rien de moins que l'invention de la techno. Cet album ouvrira également la voie aux croisements hybrides entre rythmiques dansantes et rock.
Echo and the Bunnymen:
«Corcupine» (Sire, 1983) pour le très disco «Back of love».new order: «Power, Corruption and Lies» (Factory records, 1983) parce que cet album a inventé la techno. A noter l'avant-gardiste «Ecstasy» avec ses voix trafiquée.
The Cure:
«Pornography» (Fiction Records, 1982). Un album dépouillé et colérique, considéré comme un des meilleurs albums du groupe.
Talking Heads:
«Remain in Light» (Sire Records, 1980). Album remarquable sur lequel collabore Brian Eno. L'image Arty et précieuse du groupe influencera des générations de musiciens jusqu'à Franz Ferdinand ou Interpol.
Joy Division:
«Closer» (Factory records 1980). La musique grave et minimaliste de ce groupe, devenu New Order à la mort de son chanteur en 1980, reste d'une troublante actualité à l'écoute de «Turn on the Bright Lights», le premier album d'Interpol.
My Bloody Valentine:
«Loveless»(Creation records, 1991)