Les trajectoires d’études sont fréquemment marquées par des changements de voie. Même si, à chaque fois, les détours paraissent faire perdre du temps, il peut en ressortir de nombreux bénéfices.
Deux étudiants témoignent : de quoi inspirer ceux qui hésitent, soit pour les dissuader, soit pour les encourager.
Jérôme Viroux
Étudiant à la Haute École de la Santé La Source
Après avoir débuté des études en français moderne et en russe, Jérôme a quitté la faculté des lettres pour intégrer la Haute École de la Santé La Source, en soins infirmiers. Cette trajectoire, il ne la regrette pas du tout : « En sortant du gymnase, je ne me serais jamais vu faire cette école. Je n’avais clairement pas la maturité nécessaire pour faire ça. ». En 2012, il l’obtient pourtant, sa maturité. Il poursuit directement en optant pour des branches qui le passionnent et dans lesquelles il a de la facilité. Sans plus de réflexion, il quitte la Broye et débarque à l’Université de Lausanne.
Après une année et demie, malgré son intérêt pour les cours, il reconsidère ses ambitions professionnelles, moins pour un manque d’opportunités que parce qu’il ne se voit pas exercer dans ce domaine.
Il prend alors de la distance en débutant le service civil. Il a déjà décidé de rejoindre le milieu de la santé. Son affectation se déroule dans le milieu hospitalier, à Cully, où ses compétences sont développées. Après avoir été chauffeur durant 6 mois, il intègre le secteur EMS durant 4 semaines.
Il voit ce temps comme une pause bienvenue et une sorte de stage d’introduction. Suite à cette expérience, Jérôme entame une année propédeutique qui lui ouvre les portes de 3 années de formation, au minimum.
S’il lui arrive de regretter d’avoir quitté l’université, son cadre plus libre et les cours suivis, il reconnaît tout de suite que le bilan est très positif. Même s’il craignait d’intégrer un monde méconnu, il est réjoui de tout avoir à apprendre à nouveau.
Il a également pu profiter des conseils du service d’orientation qui, loin de le questionner sur les raisons de sa réorientation, lui a indiqué les démarches à entreprendre pour se désinscrire, puis intégrer la haute école. Il a pu en savoir plus sur la validation de certains crédits et sur le cursus en HES (Haute école spécialisée).
Il apprécie le milieu de la santé et se voit y évoluer et apprendre constamment, car « la formation n’y est qu’un tremplin », fait-il remarquer.
Plus tard, un potentiel master en sciences infirmières à l’université le motiverait, il s’y était déjà intéressé en sortant du gymnase. La logique est vite trouvée, puisque seule une formation en santé peut lui en ouvrir les portes. C’est aussi là que les crédits acquis en lettres pourraient lui être utiles. Mais c’est pour plus tard, il se réjouit déjà d’entamer son bachelor, puis de devenir infirmier.
Simon Costa
Étudiant en français langue étrangère et espagnol à Fribourg
En 2011, Simon débute des études en cinéma et en espagnol à l’Université de Lausanne. Pas convaincu de ses choix, il termine son année sans même faire les examens d’espagnol et avec de mauvais résultats en cinéma.
Dégoûté par ce qu’il y étudie et l’écart avec ses attentes, il n’assistait plus aux cours et avait depuis longtemps choisi d’arrêter.
Durant l’été, il part en stage linguistique à Barcelone pour y améliorer son catalan. À son retour, il décide d’entamer un bachelor en sciences sociales, en reprenant l’espagnol comme deuxième branche.
Si les cours l’intéressent et qu’il s’y fait de bons amis, la même question le taraude : « Où est-ce que je vais ? ».
L’anthropologie l’a poussé à débuter les sciences sociales, et c’est le seul examen qu’il réussit du premier coup. Même s’il tente les rattrapages 6 mois plus tard, il n’est plus convaincu et n’étudie pas assez.
Sa copine du moment est déjà salariée tandis qu’il a l’impression de n’arriver à rien. Après avoir échoué à nouveau, il travaille comme répétiteur et livreur de pizzas.
Depuis sa première année d’université, il avait des doutes: « J’avais perdu la confiance dans mes capacités, je me sentais comme quelqu’un qui ne pourrait jamais rien faire. Après 2 ans et demi, je voulais passer à autre chose ».
Ses projets commencent peu à peu à se préciser et il trouve enfin sa vocation : professeur de français pour non francophones.
Son stage linguistique aura eu l’effet d’une révélation. « Je me suis dit que pour ces cours, il devait bien y avoir des professeurs spécialisés. Après m’être informé, j’ai trouvé l’équivalent en français, à Fribourg ».
Même si l’enseignement et le français l’intéressaient déjà depuis longtemps, il ne connaissait pas la possibilité d’étudier le français langue étrangère.
Au moment d’envisager la suite, il cerne enfin plus précisément ce qui le motive réellement et qui pourrait constituer son futur métier. Un père professeur de français et une mère logopédiste lui ont transmis le sens de la pédagogie et le goût du français, sa branche préférée durant toute sa scolarité. Son activité de répétiteur, durant les 6 mois suivant son échec en sciences sociales, confirme son plaisir d’enseigner. Tout va dans le même sens.
Après une année à Fribourg, c’est confirmé. Il peut enfin étudier en sachant où il va.
Il ne regrette pas d’avoir choisi cette université. L’espagnol y est enseigné d’une manière qui lui convient mieux. Il a pu faire valider les crédits de sa première année à Lausanne et bénéficier des compétences acquises en sociologie pour se simplifier la vie dans certains cours visant à éveiller la sensibilité culturelle des apprenants.
Avant même de commencer, il ne se posait plus de questions: « C’était bon, j’avais trouvé ma voie ».