Depuis «l'auberge espagnole», l'Espagne de Cédric Klapisch attire de nombreux étudiants Erasmus. Mais les folles nuits espagnoles sont-elles vraiment compatibles avec les études? Qu'en est-il des étudiants qui souhaitent quand même se réveiller le matin sans l'inévitable gueule de bois? Interview d'Irène, une jeune Espagnole de 21 ans, étudiante en Droit à l'Université Carlos III de Madrid.
Comment décrirais-tu ton université aux étudiants de Suisse romande?
La Carlos III est la 3ème université publique de Madrid. Elle a été construite il y a environ 10 ans, sous le gouvernement socialiste qui a voulu créer une université moderne, mais aussi exigeante avec les derniers moyens technologiques. Ses 3 campus (Leganés, Getafe, Colmenarejo) sont situés dans la banlieue de Madrid. L'université ne compte pas beaucoup d'étudiants, surtout si on la compare à l'université Complutense et Autonoma (les 2 grandes universités de Madrid).
A quoi ressemble la vie d'étudiant, en dehors des salles de cours?
Comme c'est une université nouvelle, la vie estudiantine est encore en train de se créer: peu à peu apparaissent de nouvelles associations d'étudiants, etc... Les étudiants Erasmus apportent un air nouveau chaque semestre. La cafétéria est le noyau de la vie des étudiants: les jeux de cartes, les 'patatas bravas' (patates avec une sauce piquante) et le 'Calimotxo' (mélange de vin et coca) se mélangent avec les notes de classe et les livres. A la Carlos III il y a peu de grandes fêtes et ‘sangriadas' (fêtes où on vend de la Sangría!), mais les étudiants commencent à se mobiliser et à mettre en place des activités.
Le soir, où sors-tu?
Madrid est la ville de la ‘movida' (nom qu'on a donné pendant les années 80 à la nuit madrilène),et la vie s'y déroule de la même façon le jour et la nuit. Madrid est la ville d'Europe avec le plus grand nombre de bars par habitant. Dans certains bars, les Tapas sont servis gratuitement avec chaque consommation et dans d'autres, tu dois les commander à part (2 ou 3 euros par ration). Les quartiers les plus connus des jeunes s'appellent: 'Huertas' (près du centre), 'Alonso Martínez', 'Tribunal' (plus alternatif), 'Chueca' (le quartier gay a beaucoup de vie le soir, plein de monde, gay et non-gay), 'Torre Europa' (au nord, un peu bcbg), où tu peux trouver des pubs tranquilles, moins tranquilles, ouverts jusqu'à 4h du matin ou jusqu'à l'ouverture des bars pour le petit déjeuner. A Madrid, on trouve aussi de grandes discos comme Kapital ou Pachá. Pendant les examens je ne sors pas, mais pendant le reste de l'année, même le jeudi je sors boire quelque chose! Le seul problème c'est qu'à la Carlos III on nous oblige à faire des TP toutes les semaines pour presque toutes les matières, et la présence aux cours est presque obligatoire ou ‘nécessaire', ce qui est plus difficile pour les nuits de folie!
Comment ça se passe pour toi au niveau des sous?
Madrid est plus chère que le reste de l'Espagne, mais elle est dans la moyenne européenne. Le logement est environ de 300-350 euros par mois. C'est facile de trouver un petit job mais pas très bien payé: dans un pub le week-end, dans un magasin ou dans un restaurant. C'est un peu difficile de conjuguer tout ça avec les études, mais on peut y réussir! Moi j'ai une bourse pour travailler tous les matins dans le bureau Erasmus de mon université, comme ça je gagne un peu d'argent. Je connais les étudiants qui font Erasmus et qui viennent dans mon Université. Je travaille aussi comme baby-sitter, et je confectionne des choses artisanales avec la laine pour les vendre (des bonnets, écharpes, trousses, etc.) et comme ça je peux m'autofinancer vu que mes parents ne me donnent pas d'argent de poche.
Que penses-tu faire après tes études?
J'ai presque fini mes études de Droit et je voudrais me spécialiser en Politique Internationale, pour travailler dans la Coopération Internationale. J'aimerais aussi partir à l'étranger pour finir mes études et par la suite continuer ma formation. Trouver un bon travail n'est pas facile en Espagne. Normalement ce sont des emplois précaires qui ne te permettent pas d'être indépendant à 100%. De plus en plus, il ne suffit pas d'avoir un titre universitaire: les masters ou ‘postgrados' sont nécessaires pour pouvoir trouver des jobs acceptables!
Maintenant les grandes entreprises sont très présentes dans les universités mais cela ne garantit pas la qualité du travail que l'on peut exercer. Mais elles fournissent un travail précaire aux étudiants dont j'ai parlé auparavant.