Dormir sur le canapé d'un inconnu, ça te tente? J'ai voulu tester le couchsurfing, ce système d'hébergement révolutionnaire pour globe-trotters. Deux millions de personnes dans le monde sont disposées à accueillir des voyageurs de passage quelques nuits dans leur salon, gratuitement. Conviviale et économique, la méthode convient particulièrement aux étudiants. D'une part, le couchsurfing permet de loger chez l'habitant, qui selon ses disponibilités proposera à son hôte de discuter autour d'un verre. D'autre part, c'est la fin des dépenses folles en hôtels ou auberges de jeunesse: à condition de s'organiser, il est possible de voyager des mois sans payer pour être logé.
Pour rejoindre le réseau, il suffit de créer un compte et de proposer - ou pas - ton canapé à d'autres baroudeurs sur le site éponyme. Une carte interactive permet de visionner par ville les différents hôtes disposés à t'accueillir, avec photo et description des conditions d'accueil, telles que le nombre de couchsurfers admis, pour combien de nuitées, le lieu de couchage (matelas, canapé, avec ou sans couverture) ou les horaires qui arrangent l'hôte. Parmi la communauté mondiale de couchsurfers, il faut sélectionner des hébergeurs potentiels d'après deux critères: leur statut, qui permet de savoir s'ils sont plus ou moins susceptibles d'accueillir un voyageur en ce moment, et leur crédibilité, grâce aux témoignages laissés par de précédents couchsurfers.
J'ai choisi les Grisons comme destination pour ma première expérience d'hébergement gratuit et alternatif. Mon canapé me sera gentiment prêté par un Australien expatrié dans les montagnes suisses. J'envoie d'abord des demandes à plusieurs autochtones, car je m'y prends un peu à la dernière minute et je crains de ne pas recevoir de réponse assez vite. Je pars pour deux journées de marche avec une amie, et... je préfèrerais ne pas lui annoncer que nous passons la nuit sous un pont. Je reçois deux réponses positives que je découvre le soir avant notre départ. Celui qui a joint son adresse et son numéro sera notre aimable hôte.
Nous avons rendez-vous dans un bar vers 21 heures. Malgré nos sacs à dos et notre look de marcheuses, il n'ose venir nous parler, parmi la vingtaine de buveurs de bières sur le trottoir, et préfère appeler mon téléphone pour nous identifier. Très sympa, il nous présente deux de ses colocs et quelques collègues, avec lesquels nous discutons et rigolons, en anglais. La soirée se termine dans sa cuisine autour d'une tasse de thé.
Ed est venu s'établir aux Grisons attiré par sa passion pour le snowboard. Il vit en colocation avec trois Suissesallemands et propose leurs deux bons gros canapés aux couchsurfers de passage. Luimême profite du réseau régulièrement. Il a ainsi voyagé dans plusieurs villes d'Europe à moindre frais. Il accueille souvent des couchsurfers: la saison a commencé plusieurs mois auparavant avec la venue de trois Asiatiques et d'autres voyageurs d'Europe du Nord. Au fil de la discussion, lui et ses colocs nous demandent s'ils pourront aussi nous rendre visite, car ils sont intéressés à pratiquer des sports nautiques sur le lac de Neuchâtel...
Passé minuit, Ed nous présente nos couches, deux gros canapés bleus, et nous prête à chacune une couverture. On se dit déjà au revoir car, le lendemain, il sera parti lorsque nous nous lèverons pour prendre le train de 8h à destination de Zernez, direction le Parc National Suisse. Le lendemain, après une agréable nuit sur les moelleux canapés, nous partons en laissant un petit mot de remerciement avant de quitter sur la pointe des pieds l'appartement où ronflent encore quelques colocs. Ravies par cette première expérience du couchsurfing, nous nous promettons de recommencer!
L'organisation des couchsurfers donne quelques recommandations utiles pour éviter de se retrouver en mauvaise posture. Le premier conseil: rencontrer son hôte dans un bar plutôt que d'arriver directement chez lui. Ainsi, le premier contact a lieu sur terrain neutre. Cela laisse le temps de se faire une idée sur sa personnalité.
L'organisation encourage les voyageurs à suivre leur instinct, et donc d'abandonner l'idée de dormir chez une personne qu'ils trouveraient bizarre, même si cette impression peut paraître irrationnelle sur le moment. Une règle d'or pour voyager en toute sécurité est d'avoir les moyens de choisir un plan B en toutes circonstances: assez d'argent pour une nuit à l'hôtel.
Il faut préparer le terrain avant la rencontre. Sur le profil de chaque hôte, il est possible de lire les témoignages laissés par de précédents couchsurfers qui ont rencontré ton futur hôte. L'astuce est de faire confiance aux membres «vérifiés», qui ont effectivement été rencontrés par des «délégués» du réseau (il en existe dans chaque grande ville).
Voyager à plusieurs est aussi une manière d'être plus serein, surtout s'il s'agit de ta première expérience. Attention cependant, les adeptes du système n'ont pas toujours la place d'accueillir toute une colonie! Vérifie les conditions sur leur fiche.