Tu rêves d’apprendre une nouvelle langue, de gagner de l’argent ou tout simplement de faire un break dans tes études? dans ce cas, comme de plus en plus d’étudiants, tu planifies peutêtre de t’offrir une année sabbatique. Mais attention! Pas question de partir les yeux fermés et les deux bras en avant. Un tel projet, ça se prépare. Au risque de finir droit dans le mur. Une année sabbatique, c’est l’occasion en or de sortir du monde académique, de te défaire de la pression des résultats et de faire ce qui te plaît. Du stage à l’apprentissage d’une langue en passant par les voyages, elle peut prendre des formes variées. A chaque type de congé correspond des besoins spécifiques. A toi d’identifi er les tiens, en fonction de tes envies, mais aussi de ta situation académique. «Le plus souvent, les étudiants choisissent de prendre une année sabbatique entre la maturité et l’université», selon Elisabeth Lamont, responsable du Service d’orientation et conseil de l’Université de Lausanne. Cela dit, bien que plus rare et compliqué, il est aussi possible de faire une pause au milieu de son cursus. La plupart des hautes écoles octroient en effet des congés dont la durée varie d’un semestre à deux ans. |
Le congé sabbatique entre le bachelor et le master a également la cote auprès des étudiants. dans ce cas, l’acquisition d’une expérience professionnelle est le principal motif invoqué, selon l’office fédéral de la statistique (OFS).
De plus en plus de candidats à l’embauche font d’ailleurs mention d’une année sabbatique dans leur CV, d’après José M. San José, porte-parole d’Adecco, numéro un du travail temporaire en Suisse. Un pari gagnant, selon Mirela Fry, psychothérapeute à Carouge. Elle estime que 7 à 8% des directeurs d’entreprises jugent désormais qu’une année sabbatique est aussi importante qu’un diplôme.
Un avis partagé par le porteparole d’Adecco, qui considère la présence d’une année sabbatique sur un CV comme un plus «dans tous les cas». Selon lui, la meilleure façon de valoriser son congé est d’obtenir un certifi cat de langue ou de travail, fi xe ou temporaire, ou un emploi de stage.
L’entreprise d’intérim est également sensible aux capacités que permet de développer chez un étudiant ce type de projet. «Réaliser un séjour à l’étranger demande de l’organisation, une capacité à s’imposer et du courage. C’est également l’occasion de faire connaissance avec d’autres cultures et d’élargir son horizon», s’enthousiasme le porte-parole.
«Je ne savais pas trop quoi faire, alors j’ai pris une année sabbatique.» Cette phrase, qui ne l’a pas déjà entendue, voire prononcée? Pour Mirela Fry, l’année sabbatique peut effectivement contribuer à se remettre en selle. A condition toutefois d’y être préparé. «O n ne part pas dans la jungle sans être armé», image-t-elle. Dans le cas contraire, le risque est grand de revenir au point de départ une fois le congé écoulé. «Si c’est pour une fuir une réalité, mieux vaut éviter», prévient-elle.
«En cas de doutes, l’intermédiaire le plus sûr est de ne pas partir et de mener un projet sur place. Ce système à l’avantage de prendre du recul tout en restant dans un cadre connu et sécurisant. Il n’est pas nécessaire de partir en Australie pour se trouver», conseille-t-elle.
Il est essentiel de se poser les bonnes questions. Pourquoi est-ce que je veux faire une année sabbatique? Qu’estce que je cherche? Mieux vaut être au clair avec soimême avant d’entamer son break académique. Celui-ci peut alors se transformer en véritable quête identitaire, explique la psychothérapeute.
A une époque où les jeunes manquent souvent de repères auxquels se raccrocher, l’année sabbatique peut aussi faire office de rituel, poursuitelle. «Des rites comme le mariage ou l’armée, très structurant psychiquement, tendent à perdre en importance aujourd’hui», selon elle. Le congé sabbatique peut alors se charger de remplir cette fonction.
Et après, je fais quoi? «Le retour aux études après une année sabbatique peut s’avérer périlleux», met en garde Elisabeth Lamont. «Certains étudiants finissent même par décrocher totalement», ajoute la psychologue conseillère en orientation, pour qui l’année sabbatique n’est pas toujours la solution la plus adaptée.
Philippe en a fait l’expérience. Sa maturité en poche, il décide de prendre une année sabbatique pour travailler et économiser. Il enchaîne alors les petits boulots. Une année passe, puis deux, et il décide finalement de commencer des études en droit à Genève, mais raccroche très vite. «Après avoir passé deux ans à travailler, le système académique ne me convenait plus», analyse-t-il lucidement.
A l’inverse, Letitia explique que son année sabbatique prise juste avant d’entamer son bachelor l’a remotivée à étudier. Elle non plus ne savait pas vraiment ce qu’elle voulait faire, alors elle a décidé de partir voyager. D’abord aux Etats-Unis, puis en Australie.
Pour y arriver, elle travaille pendant un mois dans une banque à Genève. Après son congé, elle débute un bachelor en relations internationales, aujourd’hui accompli sans accroc. «Le retour aux études a été beaucoup plus facile que prévu», commente-t-elle.
Comme en témoigne son cas, les craintes associées aux années sabbatiques ne sont pas toujours fondées. Une étude de l’Université de Genève datant de 2003 démontre que les jeunes ayant pris un congé entre la maturité et le bachelor obtiennent d’excellents résultats en première année d’université.
Des conclusions qui n’étonnent pas Mirela Fry. «Une année sabbatique permet de prendre du recul par rapport au monde académique et de se défaire de la pression des résultats», avance la psychothérapeute. En outre, elle aide à s’affirmer et à développer de nouvelles aptitudes sociales, selon elle.
Des propos nuancés par Elisabeth Lamont, qui conseille en général aux étudiants de poursuivre leurs études directement après leur maturité, en particulier pour les filières les plus pointues. «O n n‘est jamais mieux préparé scolairement qu’après la maturité», argumente-t-elle.
Et s’il fallait malgré tout prodiguer quelques conseils pour réussir son année sabbatique? «Soyez actifs, exigeants envers vous-mêmes. Commencez tôt à chercher un stage ou un travail. Mais surtout, faites-vous aider, discutez-en autour de vous. Ne restez pas inactifs!», recommande Elisabeth Lamont.
La réforme de Bologne, en divisant les études universitaires en trois cycles (bachelor, master, doctorat), a bouleversé les cursus et favorisé les années sabbatiques. Il est désormais possible de faire une pause entre deux cycles et non plus en cours de cursus.
Une possibilité largement exploitée, selon une étude réalisée auprès de 24’000 étudiants par l’Office fédéral de la statistique (OFS). A l’heure actuelle, environ 35% des étudiants en Suisse choisissent ainsi de ne pas enchaîner directement le bachelor et le master. Un chiffre qui ne cesse d’augmenter.
La première raison invoquée pour prendre une année sabbatique est la volonté d’acquérir une expérience professionnelle. Les difficultés financières arrivent en deuxième position. Viennent ensuite l’envie d’apprendre une nouvelle langue et les contraintes liées à l’agenda. D’autres motifs comme le service militaire ou les voyages sont également mentionnés par un tiers des étudiants ayant choisi de faire un break. Enfin, des obstacles institutionnels obligent parfois à faire une pause.
L’OFS révèle aussi que les étudiants des hautes écoles spécialisées (HES) sont plus nombreux à prendre des congés de longue durée que ceux des hautes écoles universitaires (HEU). Ce phénomène est en particulier dû au fait que les premiers sont souvent confrontés à des exigences supplémentaires pour accéder au master.